La Bourgogne-Franche-Comté atteint-elle la neutralité carbone ?
Une balance loin de l’équilibre
Pour limiter le réchauffement planétaire à 1,5 °C, le dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) montre que les émissions de gaz à effet de serre (GES) doivent atteindre leur pic entre 2020 et 2025 au plus tard, et décroître ensuite jusqu’à atteindre la neutralité carbone en 2050.
Cet objectif, repris en France par la Stratégie nationale bas-carbone (SNBC), signifie ne pas émettre plus de carbone que la capacité d’absorption sur le territoire fournie par les puits de carbone que constituent les sols et les forêts.
En Bourgogne-Franche-Comté, les activités sur le territoire régional ont émis l’équivalent de 20 millions de tonnes de CO2 en 2020, alors que les forêts et sols ont absorbé, la même année, de l’ordre de 1,2 million de tonnes de CO2. Le puits net de carbone a ainsi compensé à peine 6 % des émissions de GES, l’objectif étant d’atteindre 100 % en 2050.
Son atteinte ne sera possible que par une réduction massive des émissions de GES dans tous les secteurs. Or, l’évolution des émissions de GES est loin de la trajectoire attendue : corrigées des variations climatiques, elles ont diminué de 13 % entre 2008 et 2018, puis de 10 % entre 2018 et 2020. Si l’on excepte l’année atypique de 2020, il faudrait multiplier le rythme de diminution par trois pour atteindre les objectifs.
La capacité d’absorption du carbone des forêts a par ailleurs diminué ces cinq dernières années, mise à mal par les sécheresses et les attaques de parasites. Celle des sols a été grignotée par leur artificialisation.
Des milieux favorables à la séquestration du carbone
La Bourgogne-Franche-Comté est une région plutôt favorisée par la présence importante de forêts, prairies, bocages et zones humides, qui constituent des milieux favorables à la séquestration du carbone. En 2020, les sols et les forêts se sont comportés, globalement, comme un puits net de carbone, séquestrant près de 1,2 million de tonnes équivalent CO2 supplémentaires.
La capacité d’absorption de CO2 varie selon l’occupation des sols. La forêt et les prairies ont ainsi été à l’origine d’absorptions supplémentaires, alors que les cultures, les zones artificialisées et, dans une moindre mesure, les zones humides ont été responsables d’un déstockage de carbone.
Un puits net de carbone diminué par l’impact du changement climatique
On observe une nette diminution du puits de carbone régional ces dernières années, qui est passé de 5,1 millions de tonnes de CO2 en 2015 à 1,2 million en 2020. Le stock de carbone en place est toujours présent, mais il ne « grossit » plus autant qu’avant 2015.
Ce recul s’explique principalement par une réduction du puits forestier. Depuis 2015, les effets du changement climatique se sont traduits par des sécheresses répétées et la prolifération de parasites, insectes et champignons, qui ont entrainé une baisse de productivité des forêts et augmenté les dépérissements.
Certains changements dans l’usage des sols sont également responsables d’un déstockage de carbone. C’est le cas de l’accroissement des surfaces en cultures (+20 %) depuis 1990, au détriment des prairies (-21 %) qui ont subi le retournement en cultures. L’artificialisation des sols a également progressé d’un tiers entre 1990 et 2020, en grignotant principalement des surfaces de prairies et de cultures.
L’UTCATF prend une valeur négative en Bourgogne-Franche-Comté. Cela signifie que les sols et les forêts se sont comportés comme un puits net de CO2, c’est-à-dire qu’ils séquestrent chaque année un flux supplémentaire de CO2. En valeur absolue, l’UTCATF diminue fortement depuis 2015, ce qui signifie que ce flux supplémentaire s’amenuise.
L’UTCATF (utilisation des terres, changement d’affectation des terres et foresterie) prend en compte les émissions et absorptions liées à l’utilisation des terres (croissance, mortalité de la biomasse et prélèvement de bois en forêt ; impacts des changements de pratiques agricoles sur les sols cultivés, etc.) et aux changements d’utilisation des terres (déforestation, artificialisation des sols, mise en culture de prairies, etc.). Ce secteur, défini dans le cadre des inventaires nationaux d’émissions de gaz à effet de serre, peut ainsi constituer une source nette ou un puits net de CO2.
Les méthodes de calcul de ces émissions et absorptions sont définies par le GIEC, dans le cadre de la Convention cadre des Nations Unies sur le changement climatique (CCNUCC). Elles sont mises en œuvre par le CITEPA, qui a transmis les données présentées ici. L’estimation du secteur UTCATF présente de fortes incertitudes. Les résultats sont à considérer comme des ordres de grandeur et l’interprétation des évolutions interannuelles est à faire avec prudence.
Date de modification : 13 décembre 2023